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Jacques BOLO

Pour Brassens

Ebook, ed. Lingua Franca, Paris, octobre 2021, 80 p., EAN : 9782912059093, 3 €

Version papier ed. Lingua Franca, Paris, décembre 2021, 80 p., EAN : 9782912059130, 9 €

Introduction

Antoine Perraud, journaliste de Médiapart que l'on croyait plus subtil, a réalisé une série d'été de quatre articles sur Georges Brassens (1921-1981). Il a apparemment beaucoup travaillé et s'est coltiné toute la discographie et la documentation biographique, qu'il considère comme : « un corpus à la fois obsessionnel et foisonnant – 171 textes écrits de sa main, auxquels il faut ajouter 21 poèmes (de François Villon à Paul Fort, en passant par Victor Hugo ou Louis Aragon) mis en musique. »

L'étude de Perraud est assez exhaustive, même s'il se concentre sur certains thèmes. Il fait au passage une découverte étonnante. C'est un métier de se préparer pour le centenaire de la naissance du chanteur (22 octobre 1921). Perraud va donc prétendre « désembaumer » Brassens, mais le titre de sa série, « Brassens pris ‘aux mots' », qui se veut légitimé par les citations exactes des textes des chansons, constitue plutôt l'aveu d'un abus de littéralisme. Après les deux premiers volets, « Le dernier des troubadours » et « Les sain(t)s principes brasséniens », qui avaient abusé les fans du poète, Perraud se livre à un dégommage en règle dans « ‘Les Copains d'abord', ou l'abdication politique » et « Misogynie guère à part, phallocratie galopante » qui ont révulsé les mêmes partisans de Brassens. Perraud prétend même procéder « à la loyale : [en scrutant] ce qu'il nous a légué plutôt que de fureter dans ce qu'il s'évertua, sa vie durant, à cacher. » Diantre ! Comme dirait l'autre, Perraud fait-il dans le classique « Brassens avance masqué ? » L'époque est décidément au complotisme. Il est vrai que Médiapart se spécialise un peu trop dans la dénonciation de scandales.

Il ne s'agit pas non plus pour moi ici de dire que l'attitude que Perraud attribue à Brassens s'excuse par le contexte (Perraud nous fait le coup ‘du contexte n'est pas une excuse' : « On aura donc beau contextualiser avec vaillance »). Mais il ne faut justement pas négliger que les chansons de Brassens doivent s'interpréter en réaction au contexte et aux nombreux tabous qui régnaient à l'époque. C'est sa réputation de provocateur et elle est exacte sur ce point. Il est évident que les provocateurs vont trop loin par définition. De fait, « La mauvaise réputation » que Perraud tente de faire à Brassens aurait plutôt tendance à correspondre à l'image de ceux de ses contemporains qui le détestaient ou le dépréciaient. Entre Perraud et Brassens, le plus médiéval des deux n'est pas celui qu'on pourrait penser.


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